fbpx → Passer directement au contenu principal
The Pan African Music Magazine
©2024 PAM Magazine - Design par Trafik - Site par Moonshine - Tous droits réservés. IDOL MEDIA, une division du groupe IDOL.
Le lien a été copié
Le lien n'a pas pu être copié.

Angel‑Ho, sexe, pop et conte de fées

La Sud-Africaine Angel-Ho rejoint les rangs de la maison Hyperdub pour un premier album de pop post-moderne brutale et aphrodisiaque.

Photo une © Jody Brand

Jusqu’à présent éprouvée en tant que DJ et productrice, Angel-Ho taquinait les internautes fin 2018 en dévoilant coup sur coup trois titres instrumentaux massifs composés au scalpel. Elle amène ici sa musique à un autre niveau, endossant instantanément le costume de la diva pop pour donner naissance à son tout premier album Death becomes her. Elle débarque par la même occasion en grande pompe sur l’exigeant label Hyperdub, laissant sa propre structure NON Worldwide entre parenthèses.

« Ça fait un moment que je collabore et discute avec Hyperdub. Mon évolution musicale m’a amenée à me tourner vers un plus gros label. Je n’ai pas sorti mon album sur NON Worldwide car mon label est orienté sur la promotion d’autres artistes, et je ne m’en occupe plus aujourd’hui », nous explique-t-elle par téléphone, d’une voix posée et androgyne. En effet, le label de Burial, Ikonika ou Jessy Lanza ressemble à un foyer d’accueil cohérent pour permettre à ce type de pop incisive et parfois délicieusement malsaine, de s’étendre à un public aussi large qu’averti.


La Diva pop du futur

Sur cet album, la nouveauté est loin d’être anodine, puisqu’Angel-Ho chante, et elle le fait plutôt bien. Sa voix à la fois sensuelle et autoritaire défie des arrangements électros incisifs dans un théâtre musical avant-gardiste, comme si elle donnait sa version hardcore de la diva bleue dans la scène culte du 5ème élément. « Chanter était une nécessité pour moi, nous dit-elle. J’avais le sentiment d’avoir ce besoin d’exprimer beaucoup de choses. C’est dans mon ADN d’exprimer toutes sortes d’idées dans ma musique. »

Cette présence vocale était avant tout nécessaire pour raconter des histoires centrées sur l’émancipation de sa nouvelle identité transsexuelle à travers des métaphores fantaisistes et des poésies acides. Sans pour autant reléguer son ancien corps au placard, elle assume pleinement son nouveau personnage et l’inscrit dans le fil rouge de ses textes, de manière presque onirique : « Je parle d’amour, de rupture, du fait d’être une diva pop, et de la fantaisie d’atteindre le luxe au sens ultime pour gagner mon propre amour. Il s’agit du désir personnel d’exister dans le monde. Je souhaitais exprimer toutes ces choses que je traverse dans le périple de ma vie, et que j’expérimente en ce moment. Il y a également une autre forme de sexualité qui apparaît quand je crée ma musique. J’exprime toujours la sexualité à travers la manière dont je m’habille ou me comporte. L’homosexualité et la romance composent une grosse partie de mon identité, et cet album l’exprime, comme une fantaisie. »

Puisant ses inspirations chez ces femmes badass que sont Lady Gaga ou Missy Elliott, elle évite le raccourci de l’étiquette neo-pop et nous explique la dimension qu’elle veut donner à cet album immersif, tentant alors de lui donner de la grandeur avec ses propres mots : « Je définirais mon son comme une gigantesque fresque pop qui sonne cinématique et narrative, au sens où ma capacité de songwriter a été poussée en première ligne sur ce disque. » 
 


Une créativité sans limites

« En Afrique du Sud, il n’est plus nécessairement difficile de proposer de la musique quand tu es noir ou métis. Il existe de nombreuses opportunités pour créer et décider de ton destin, en particulier quand il s’agit d’art ou de musique. L’Afrique du Sud possède une certaine richesse dans ces domaines, et c’est un pays qui a beaucoup à offrir quand il s’agit de proposer des goûts nouveaux et de créer les standards musicaux de demain dans le monde. »

Dans un pays où les idées foisonnent pour nourrir une scène électronique en reconnaissance exponentielle, Angel-ho laisse son imagination en roue libre et s’entoure de MCs pleins d’énergie telle que la rappeuse asio-américaine K-Rizz, co-responsable de « Like a Girl », premier teasing de l’album façon kwaito élevé à la dure. Côté voix, elle fait également appel à la scène locale, invitant deux de ses compatriotes de Cape Town. K-$ intervient sur le hip-hop massif de « Like that » et Qweezy vient consolider l’ambiance de film d’horreur de « Good Friday Daddy », l’un des morceaux les plus dérangeants du disque.

Toujours aux manettes d’une production influencée hip-hop sur des morceaux moites comme « Business », elle s’entoure également de producteurs expérimentaux diasporiques : « J’ai plutôt choisi les collaborateurs sur la base de ce que j’écoutais à ce moment-là. Je voulais vraiment créer une musique avant-gardiste et visionnaire, et avant tout quelque chose d’intemporel pour moi, en tant que musicienne qui démarre avec un premier album. C’est à cause de mes affinités pour le R’n’B que j’ai gravité autour d’Asmara Maroof. Je voulais créer un disque de pop et à cet égard, c’était génial de travailler avec elle, tout comme Baby Caramel, qui propose plutôt une pop aux influences 70s. Concernant mon côté expérimental, j’ai vraiment apprécié l’aide de Nunu, un producteur français qui a créé des paysages sonores ambient pour que j’y raconte un conte de fées. » 
 

© Jody Brand


Angel-Ho gravite ainsi au centre de cet écosystème de partenaires à la personnalité forte. Dans cette atmosphère électrique et parfois oppressante, on entend alors le côté sauvage du son sud-africain (« Drama »), une berceuse épique et orchestrale (« Cupido »), une bouffée d’air frais R’n’B (« Baby Tee ») et d’autres morceaux épiques (« Muse to You »), qui nous poussent malgré nous à la comparaison facile avec d’autres artistes LGBTQ. Angel-Ho nous explique qu’il ne s’agit pas d’une coïncidence: « Anohni est incroyable, et j’adore tellement Sophie, elle est vraiment une grande inspiration pour moi. La communauté LGBTQ est le groupe de personnes le plus libre au monde. Nous ne discriminons personne et nous nous aimons tous les uns les autres. Nous n’avons pas de limite. Nous décidons nous-mêmes de notre destin, nous ne réfléchissons pas en nous mettant des barrières. »


Vers une tournée épique

On imagine sans mal que cet album qui transpire le charisme risque de se transformer prochainement en une claque scénique pleine de costumes et de mises en scène. La Sud-Africaine s’y voit déjà : « Angel-Ho sur scène est très énergique. C’est très théâtral, je suis comme une déesse cosmique, une reine de l’espace. Ma personnalité et ma capacité à mettre en scène sont enracinées dans mon amour pour le théâtre musical, l’art dramatique, l’acting et les grandes représentations visuelles. Mon show est glamour, je m’arrête environ six fois pour me changer, et je joue des morceaux de l’album et des inédits. »

Autrement dit, Angel-Ho annonce sans détour qu’elle ne montera pas sur scène pour enfiler des perles, et que créer la sensation sera son principal objectif. Avant de nous quitter, elle passe un message à ses fans : « je veux juste qu’ils sachent que j’apprécie tout ce qu’ils font pour moi, je les remercie pour tout ce support et cet amour que je reçois. Jouer pour leur plaisir sera comme un périple sauvage, et ils ont déjà l’air excités à l’idée de me voir me révéler en tant que performer. »

Death becomes her sortira le 1er mars 2019 sur Hyperdub. Précommandez-le sur Bandcamp.

Lire ensuite : Bonaventure et ses mélanges électroniques maison contre toute forme d’oppression

Chargement
Confirmé
Chargement
Confirmé